Claudine et ses images

Claudine et ses images

1943 -changement de vie

Il va m'être difficile de donner la chronologie exacte des faits que je vais évoquer. Je reconstitue  selon ce qui me parait logique ! Comment voulez-vous qu'une petite fille de 10 ans ait noté quand  ou quand les évènements se sont passés.

 Il est certain que ma soeur s'est inquiétée de mon indiscipline et a craint que je devienne de plus en plus ingérable. J'avoue !

 

Dans un premier temps, ma marraine qui  habitait vers le jardin du Luxembourg, a proposé de me prendre chez elle. Dans sa loge de concierge ! Et je m'y étais préparée pour la rentrée suivante.

 

Toutefois, certainement à Pâques, je suis partie  avec Grand-mère, en vacances chez tante Thérèse, la jumelle de Raymonde, à Douai, rue Vital Bachelet  prolongée (1), à quelques maisons de celle où j'étais née. Cette dernière, abîmée lors du bombardement de septembre 1939, avait été  laissée par ma marraine et son époux qui avaient d'abord été à Rennes avant de s'installer à Paris.

 

La rue Vital Bachelet prolongée  n'avait de rue que le nom car elle n'était pas goudronnée et dans la terre s'étaient formées des ornières au passage des brouettes de habitants, qui avaient tous des jardins, ou des rares voitures qui s'y aventuraient. Les habitations étaient des baraques en bois. Il fallait aller chercher l'eau potable à une fontaine collective, à une centaine de mètres. Et, pour la lessive, le lavage des légumes, la vaisselle ou  la toilette, on prenait celle de grands réservoirs accolés près des maisons et qui recueillaient la pluie dégoulinant du toit. Autre détail : les sanitaires était "la cabane au fond du jardin". Je n'aimais pas y aller ; il y avait des sortes de gros vers blancs qui se tordaient par terre. Mais pour l'oncle Julien, là se trouvait l'engrais qui faisaient pousser les légumes. Cet oncle d'origine  flamande était arrivé en France  au début de la guerre 14 et avait trouvé  tante Thérèse à son goût, lui avait fait un enfant et l'avait épousée. Ma cousine Irénée avait aussi été précoce et son fils Daniel  était né  quelques  mois avant  moi. Nous étions donc du même âge.

 

Dans cette rue  il y avait beaucoup d'enfants. J'avais pour copines Fernande Delabie et Josiane Péru. Josiane  était la seule fille d'une famille nombreuse. La maison de ses parents était face à celle délaissée par ma marraine. Il y avait une autre fillette, Suzy, qui venait parfois discuter avec nous  et sa maison terminait la rue Vital Bachelet avant qu'elle se prolonge, en perpendiculaire, par la voie aux baraquements. Et sa jolie maison était en brique ! Ensuite étaient des champs. Et ce vaste espace plat permettait de voir au loin, la ville de Douai d'où émergeaient, au dessus des toits, le clocher de l'église Saint Jacques et le beffroi de l'hôtel de ville , qui fut peint par Corot.

 

Les vacances là bas étaient LIBERTE !

 

Et puis un jour, tante Thérèse m'appela. Et ma surprise fut grande de voir un couple dont l'homme semblait être mon père mais la femme une inconnue. J'étais décontenancée  jusqu'à ce qu'on me précise : c'était mon parrain, le frère de papa, et son épouse. Par des photos, j'ai appris, plus tard, que nous étions allés les voir à Lille, cinq ou six ans auparavant  mais je n'en avais aucun souvenir.

 

De retour  à Paris, il fut encore question que j'aille vivre chez marraine

 

J'avais dit au revoir à mes copines de patronage catholique et aux "mères" qui nous distrayaient.

 

Mais papa  s'y est opposé. On ne pouvait pas m'envoyer  habiter dans un lieu si petit !

 

Je me rappelle avoir embrassé, de plaisir, la mère supérieure en annonçant que je restais vivre avec ma soeur et grand mère.

Je me trompais un peu car, en fait, papa avait demandé à son frère de m'accueillir et attendait sa réponse.

 

Ce fut oui.

 

Ma cousine Marie Louise et son fiancé Marcel, vinrent me chercher en juillet 1943 et ma vie prit un autre tournant. j'arrivais à Fives Lille dans une famille qui m'accepta comme une autre fille à aimer.

 

 

(1) La rue Vital Bachelet  prolongée  a été transformée. Il y a de grands immeubles et elle s'appelle maintenant  rue Jemmepes.

 

 

 



04/12/2019
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