Claudine et ses images

Claudine et ses images

Après l'arrestation

Les policiers sont restés  une semaine, peut-être plus, chez nous. J'étais suivie quand j'allais à l'école mais pas au retour ce qui fait que j'ai pu prévenir des amis. Quand l'un des policiers a ouvert la radio pour se distraire, Grand mère furieuse est venue fermer le poste en déclarant " C'est pas vous qui payez l'électricité !"

 

Donc papa et maman, ainsi que tante Raymonde étaient en prison. Notre oncle Augustin était revenu d'un camp de prisonnier, peu avant, il avait un cancer ! Je lui consacrerais un  petit article car je l'aimais bien. Il vivait au 3ème, chez lui.

 

Tout avait été fouillé et le vin accumulé pour ma communion a été apprécié des policiers et de la concierge. Un oubli  pourtant : le canapé-coffre de tante Raymonde qui servait de cachette a gardé son secret, fort heureusement, ce qui a évité une condamnation à mort puisque qu'aucune preuve n'a pu être trouvée sur place !

 

Notre appartement était devenu une souricière dont fit les frais l'oncle Marcel qui habitait en face ! Mais il fut relâché, ce qui était juste car il ignorait l'implication résistante de mes parents( peut-être la devinait-il !). Par contre, Madeleine Marzin, une des responsables du réseau se fit prendre. Elle donna son identité et sa profession : institutrice. Elle, aussi, avait été dénoncée et elle fut arrêtée. Dans la rue  elle cria qu'on l'attaquait  mais les gens venus à son secours eurent les cartes des policiers sous les yeux et durent laisser faire. De  plus lors de la manifestation contre le marché noir, rue de Buci, à l'origine de l'arrestation, elle s'était faite remarquer en pillant le magasin fraudeur  pour distribuer aux passantes des marchandises introuvables. Je fais un bond en avant pour relater son évasion : lors du transferts des détenues, dont maman et tante Raymonde, à la prison de Rennes, ces femmes furent mises dans un wagon où, violemment,  elles se disputèrent les places "en se crêpant le chignon" . Les gardiens furent ainsi occupés à séparer les acharnées, évidemment maman et tante Raymonde étaient du nombre, et ils ne purent voir Madeleine, une toute petite bonne femme, passer par la fenêtre donnant sur les rails où des cheminots la recueillirent et la cachèrent. Le plan avait réussi ! Ainsi, elle a pu continuer son action de résistance.

 

Le procès eut lieu et grand-mère y assista. Tristement,  elle nous annonça : "Vous ne reverrez plus vos parents, ils ont des peines de prison".

Andrée réagit tout de suite : "Ah mais si, nous les reverrons car la guerre finira et ils seront libérés".  Et j'ai toujours sa voix dans ma tête !

 

Papa était condamné à la prison à perpétuité, bagnard. Maman à 10 ans de prison et tante Raymonde à 5 ans.

 

Papa quitta Fresnes pour le bagne de Melun tandis que maman et tante Raymonde furent transférées de la Petite Roquette à la prison de Rennes.

 

J'ai pu voir papa, presque chaque semaine, car j'accompagnais Andrée, d'abord à Fresnes  et ensuite à Melun, mais je n'ai revu maman qu'en mai 1945 !

 

Certaines personnes nous toisaient dans la rue et notamment une ancienne concierge de l'immeuble, une pipelette malfaisante. Un jour, cela m'a tellement énervée que je lui ai crié : "Après la guerre , on te pendra et ton Pétain avec"  Ma sœur m'a tirée vivement dans le hall d'entrée car ce n'était pas chose  à dire à cette époque mais elle  devait approuver, je pense.

 

 

 

 

 



18/06/2017
1 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 28 autres membres