Claudine et ses images

Claudine et ses images

bombardements

Le premier qui me revient en tête est celui de Paris au printemps 1940. Et pourtant, à part la sirène d'alarme, je n'ai rien entendu !

 

C'était durant un jour d'école ! Et les maîtresses ont conduit leurs élèves dans une cave. Donc le souvenir est celui de cet entassement en couloir étroit dans lequel nous rions et bavardions sans aucune frayeur.

 

A Fives, ce fut autre chose. Il y avait une usine, non loin à vol d'oiseau, je crois que l'on y construisait des  locomotives. Et elle fut une  des cibles à atteindre.

 

Pour sécuriser la cave, où nous accédions par la trappe du café, les "hommes" l'avaient consolidée par des madriers qui soutenaient les poutres. Bien qu'un  peu flou dans ma tête, je me rappelle que, sur des étagères, Marraine avait entassé des vivres et, plus tard, des petits pots de crème pour  pouvoir nourrir le bébé.

 

Peu de temps  après  mon arrivée, puisque je dormais encore sur le billard, j'ai entendu un sifflement, un sifflement que je n'ai oublié que de nombreuses années après la guerre. C'était des avions appelés Mosquito ; nous, nous disions "moustique" et on a juste eu le temps de descendre  à la cave les bombes  sont tombées avec  un bruit de détonation. J'ai eu peur et j'ai toujours eu peur ensuite lors des alertes.

 

Il m'est, même, arrivé une fois d'uriner alors que j'étais assise sur les genoux de Marcel, l'époux de Malou. Il est vrai que cette fois, ce fut terrible. Je revois Marcel Baert revenant du travail et déposant son vélo avant de s'engouffrer dans l'escalier pour nous rejoindre. Le bruit des bombes qui tombaient était assourdissant et la trappe d'ouverture s'est refermée. C'était inquiétant et nous ne savions pas si nous pourrions ressortir. Le sol de la cave tremblait. La maison, qui subissait des secousses, était -elle encore debout ? Quand ce fut fini, et que les Marcel  ont unis leurs forces pour soulever la trappe, ce fut un soulagement de constater que rien ne la bloquait et que nous pouvions sortir normalement. Les seuls dégâts étaient la déformation de la cloison qui séparait le café des autres pièces sur cour.  Mais sur le trottoir d'en face une bombe avait démoli l'immeuble où mes copains jouions peu de temps auparavant.  Les locataires des garnis, étaient allés se réfugier dans la cave d'une brasserie dans une rue plus loin. Et  ce bâtiment avait été touché. Leur abri avait tenu le coup mais ils ont eu des difficultés à en sortir et sont revenus traumatisés.

 

Les alertes avaient lieu de  jour ou de nuit.  Et nous savions quelle armée avait bombardé selon l'arrivée des bombes meurtrières. Avec la Royal Air Force  leur chute était proche de  l'usine  ; par contre avec les bombardiers américains  ça tombait  un peu partout autour car ils restaient haut dans le ciel contrairement aux avions anglais qui descendaient assez bas pour viser le mieux possible et éviter  les maisons.  De nuit, parfois, des fusées éclairantes  inondaient le ciel  c'était beau et effrayant  à la fois !

 

Proche de la rue Pierre Legrand, II y avait rue  dont un seul côté était bâti de modestes pavillons ouvriers et ce lotissement était appelé "les 22", car c'était leur nombre. Elle était déjà en ruine, avant mon arrivée. Et il y a, donc, eu cette bombe arrivée  face  à chez  parrain. Puis sur le chemin du lycée, plus tard, une maison fut éventrée et l'on voyait  diverses choses encore accrochées aux murs, les restes d'une vie familiale. Je ne me souviens pas si l'on  parlait des  morts éventuels. Et il était presque sûr que cela  était le résultat de bombardements  étasuniens moins précis que ceux anglais.

 

Avec une copine, Ginette je crois, on essayait de trouver des morceaux de bois, denrées précieuses  pour faire chauffer les cuisinières. Curieusement, on n'avait aucun scrupule  à fouiller là où des vies avaient été brisées. Cela devenait "la norme" en ce temps de guerre. Mais, en général, nous ne trouvions rien, car d'autres intrus étaient passés avant nous en crapahutant dans les monceaux de pierres et de pans de murs qui étaient tombés.

 

En fin de guerre, ce fut un autre drame. Les Allemands visaient l'Angleterre avec des "V1" ou des " V2". Je ne saurais expliquer clairement comment cela fonctionnait. Je crois qu'il s'agissait d'une sorte de canon ultra puissant capable de projeter d'énormes obus à des centaines, voire un millier, de kilomètres. Et ceux qui n'arrivaient pas à destination  tombaient en France. C'est ainsi que, non loin, une maison fut atteinte. Là habitait une fillette de mon âge que je connaissais du catéchisme. Toute la famille fut tuée. A cet emplacement,  il y avait un trou d'une envergure impressionnante. Je ne me rappelle pas de ruine, comme si tout avait été pulvérisé, mais je pense, maintenant, qu'un déblaiement avait été nécessaire pour  retrouver les corps.

 

Et, tout cela m'a conduit à  devenir une pacifiste convaincue

 

 

 
 


08/09/2020
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